"Mammoth" by Lukas Moodysson

On peut tout avoir, être un roi et couvert d'argent sans jamais posséder le repos de l'âme. Rien ne détourne de sa finitude.

Leo et Allisson ont tout réussit dans leur vie: leur mariage, une petite fille prénommée Jackie, leur carrière: l'un a fondé une entreprise lucrative sur Internet, l'autre est chirurgienne. Ils vivent sans doute la vie rêvée de tous, pourtant quelque chose ne va pas. A l'issu d'un voyage d'affaires de Leo en Thaïlande, leur histoire va lentement se fissurer.

Allisson travaille la nuit, c'est donc une nounou Philippine, Gloria, qui s'occupe de la petite Jackie. Celle-ci est devenue plus ou moins inconsciemment pour la fillette une mère de substitution. Mais Gloria a son propre vécu. Désireuse d'offrir un meilleur avenir à ses enfants, elle a abandonné le nid familial, confiant ses enfants à sa mère. Le manque ressenti par l'absence consume les uns et les autres.

De son côté, Allisson, travaillant dans un service de nuit, souffre de ne pas voir sa fille. Isolée dans son luxueux appartement, elle sent que les liens avec Jackie lui échappent. Leo, tout aussi isolé, mais à l'autre bout du monde, prend également conscience que le vie qu'il mène ne le satisfait pas.

"Mammoth" est un film qui rappelle le travail d'Inaritu dans l'imbrication d'une histoire à l'autre et les reflets qu'il met en avant. Si l'opulence se confronte à la plus extrême des pauvretés, si l'argent se confronte au temps, un seul sentiment commun domine: l'isolement au monde. Et cette peur primaire de la perte de l'autre. Il y a un traitement tout à fait pertinent de chaque personnage de cette crainte tout le long du film. Le titre ne doit rien au hasard. C'est la crainte de l'extinction, et la fragilité de l'être qu'elle souligne, qui font de ce film une oeuvre remarquable de finesse.

Lukas Moodysson est un réalisateur suédois dont il ne faudra pas perdre la trace. Il signe un film à 'esthétique soignée, au propos distancié mais maitrisé. "Mammoth" est un film qui pousse à l'interrogation: où place-t-on ses priorités et qu'en retire-t-on au juste? Un beau film, un bon film film, sobre et profondément humain.

Le film a été projeté hier soir dans le cadre du Brussels Film Festival
et sortira prochainement dans les salles.