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Les sans-papiers de Saint-Gilles : deuxième flop, sous la bénédiction de l’Eglise catholique

Les sans-papiers de Saint-Gilles : deuxième flop, sous la bénédiction de l’Eglise catholique

La tentative d’occupation de l’église du parvis suit son cours. L’Eglise explique son refus d’accueillir les sans-papiers. Mais ceux-ci ne s’en contentent guère : les collectifs se renforcent et contre-attaquent.

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Les sans-papiers réunis mercredi devant l’église du parvis de Saint-Gilles se sont à  nouveau rassemblés hier, dans l’attente du local promis hier soir par le doyen de l’église après négociations. A 14 heures tapantes, les plus ponctuels d’entre eux sont arrivés sur la place du marché. Alors qu’ils n’ont pas encore exprimé la moindre revendication, les voilà  confrontés à  une vingtaine d’agents des forces de l’ordre, venus distribuer un arrêté communal émis par le bourgmestre de la commune en vertu duquel ils étaient chargés de procéder à  l’arrestation de toute personne stagnant sur le parvis par groupe de cinq personnes ou plus.

Un quart d’heure plus tard, la foule a doublé de volume. Au total, une cinquantaine de personnes ont répondu à  l’appel, dont un grand nombre de sympathisants belges, sans compter les journalistes et caméramans, venus s’emparer de l’événement. Le curé n’a pas encore pointé le bout de son nez, dérogeant visiblement à  la promesse faite la veille. Quant à  la police, elle se fait pressante : les agents s’éparpillent dans les groupes pour réitérer leurs menaces. Leurs intimidations sont lourdement équipées : quatre fourgons longent l’entrée de la place, abritant des agents prêts à  intervenir. Au cas où.
Toutefois, leurs injonctions sont vaines car Belges et sans-papiers, soudés, ne forment à  présent qu’un seul et unique bloc autour duquel les policiers finissent par former un cercle. Ils assistent, en spectateurs passifs, à  la détresse de ces exilés qui regardent les portes closes de l’église avec incompréhension.

Ali Guissé, Président de l’UDEP, saisit un haut-parleur et s’adresse à  la foule. Il vient d’avoir le doyen en ligne. Celui-ci s’entretient actuellement avec les responsables du local promis et attend leur feu vert pour ouvrir la salle aux demandeurs d’asile. Dans la foulée, Ali annonce qu’il a pris contact avec des députés européens pour solliciter leur aide dans son projet de réforme de la politique du Ministre de l’Intérieur, Patrick Dewael (VLD).

Dans la foule, Saïd, sans-papier vivant en Belgique depuis 6 ans attend le doyen de pied ferme et compte bien lui faire part de ses revendications. Pour lui, la régularisation des 130 « sans » de l’église Saint-Boniface est injuste : « Il faut demander la régularisation de tous les sans-papiers ! Pas seulement d’une partie! Donner les papiers à  130 personnes alors qu’on est entre 150.000 et 200.000 dans la situation, c’est injuste. ». Son ami Moussi s’indigne à  son tour devant l’indifférence de l’Eglise. « Pourquoi dans les autres villes on leur laisse manifester leur colère ? » Il fait allusion à  la basilique Saint Christophe, occupée par une cinquantaine de réfugiés, à  l’église Sainte Elizabeth à  Charleroi ainsi qu’à  l’église du Sacré-CÅ“ur à  Etterbeek où se sont installés le 1er avril dernier une vingtaine d’Iraniens. Ainsi, le refus catégorique des églises Sainte-Croix et du parvis de Saint-Gilles d’ouvrir leurs portes aux réfugiés suscite de nombreuses réactions d’incompréhension.

En effet, par ce geste inattendu et que beaucoup estiment contraire à  la charité chrétienne, l’Eglise rompt avec la tradition d’accueil et de soutien aux démunis dont elle s’est prévalu depuis la nuit des temps. Serait-ce la fin d’un cycle ? Ou les autorités ecclésiastiques se forcent-elles à  refuser la prise en otage systématique d’édifices religieux comme conséquence du « syndrome occupation » contracté par les sans-papiers suite aux régularisations obtenues grâce à  diverses occupations de lieux saints ? Du côté de l’évêché, la réponse penche plutôt de ce côté.
S’exprimant à  ce sujet, le chanoine Herman Cosijns, adjoint de l’évêque auxiliaire de Bruxelles Josef De Kesel, nous a tout d’abord signifié la différence que l’Eglise établit entre l’« occupation d’église » et la « demande d’asile ». Selon lui, ce que les sans-papiers ont revendiqué dans les lieux cités plus haut ces dernières semaines est à  classer dans le rayon occupation car comme il l’explique : « Ils ne nous demandent pas d’autorisation, ils viennent purement et simplement occuper l’église. Nous considérons que leur objectif est louable et que le gouvernement n’assume pas toutes ses responsabilités en la matière. Nous les soutenons dans leurs actions car après tant d’années passées en Belgique, ils méritent leurs papiers. Mais nous pensons également que la multiplication des occupations d’églises joue en leur défaveur parce qu’à  la longue, plus personne n’y accordera la moindre attention. Il est important que cela reste un ultime recours et que ça ne devienne pas un élément systématique dans la procédure d’acquisition des papiers ».

Argument logique, certes, mais en jouant de la sorte sur les mots, l’Eglise n’oublie-t-elle pas que ces deux types de démarches sont le fait d’une seule et même réalité : celle de l’exilé ? Car si le demandeur d’asile devient sans-papier et revendique ses droits sous ce statut, c’est uniquement parce que la force des choses l’aura contraint à  devenir un sans-papier, involontairement soumis à  la clandestinité. Pour survivre.
Et si les responsables religieux avaient daigné écouter les paroles des personnes réunies hier dans l’enceinte de l’église du parvis, ils auraient entendu que pour eux, il s’agissait bel et bien d’un « ultime recours » face au désespoir qui les anéantit de ne jamais voir arriver la reconnaissance de leur existence et de leurs contributions sur le sol belge. Ils auraient également compris qu’hier, ces hommes et femmes ne se sont pas demandés s’ils allaient occuper l’église ou y demander l’asile parce qu’à  leurs yeux, les deux démarches se confondent. Occuper un édifice religieux est bien évidemment une façon de demander aux autorités belges un asile qui leur a précédemment été refusé. Pourquoi d’autre le feraient-ils ?

Cette nuance de vocabulaire chère à  l’Eglise, Abdel Bouchoukh, président du Collectif National des Sans-Papiers, l’avait saisie. Mercredi après-midi, avant la négociation avec le doyen à  Saint-Gilles, il en avait d’ailleurs mis en garde les délégués désignés. Aujourd’hui, face à  la réaction des religieux, il accuse l’utilisation intempestive du terme « occupation » au cours de la négociation, qui aurait selon lui très largement contribué à  mettre à  mal leur chance d’avoir accès à  l’enceinte de l’église. Il s’estime, en outre, trahi par le doyen qui, en prétextant aller lui montrer un local libre en fin d’après-midi, avait rusé pour lui faire quitter l’église et en refermer les portes…
En outre, dans son analyse de l’échec de l’opération, Bouchoukh remet en question les méthodes de l’UDEP: « L’UDEP est une association qui travaille avec le gouvernement. Et son président négocie à  huis clos. Pourtant, personne n’est apte à  parler au nom de tous les sans-papiers. Ou alors, ça donne les résultats obtenus à  Saint-Boniface : 130 réfugiés régularisés. Et qu’en est-il des 150.000 autres ?» Abdel Bouchoukh avait lui-même initié en 1998 le siège de l’église du Béguinage qui avait amené en 1999 à  la régularisation de 100.000 sans-papiers. Il vise aujourd’hui le même objectif et sa stratégie est inchangée : « Il faut agir en collectifs et surtout pas en associations. Les associations sont subsidiées par le gouvernement ; qu’elles le veuillent ou non, elles sont corrompues. Nous partons du principe que ce sont les concernés eux-mêmes qui doivent prendre leur destinée en main et initier le mouvement. Les collectifs sont là  pour leur montrer la voie mais ne se permettent en aucun cas de parler en leur nom. »

Ce jeudi, Abdel Bouchoukh a investi le numéro 11A de la Rue Paul Dejaer, à  proximité de la commune de Saint-Gilles, avec une vingtaine de sans-papiers algériens qui ont entamé une grève de la faim symbolique. Privés pour le moment de la collaboration des médias, davantage focalisés sur les actions de l’UDEP, ils savent néanmoins qu’ils arriveront à  leur fin. « Notre action de grève de la faim va être suivie par les Mauritaniens, les Guinéens et encore d’autres collectifs. Tout est en train de s’organiser. Nous avons également prévu d’installer des tentes devant les bureaux de l’Office des Etrangers (WTC) et d’y camper jusqu’à  ce qu’une loi digne de ce nom en faveur des sans-papiers nous soit proposée. » déclare Abdel Bouchoukh avec détermination. L’échec de la veille le désole, certes, mais cela n’aura pas suffi à  le déstabiliser. Fort de ses expériences en la matière et de sa victoire passée, il envisage sereinement les étapes à  venir et décrète que « ce qui est important, ce n’est pas cette histoire d’église. Nous nous y sommes rendus parce qu’il s’agit traditionnellement d’un lieu d’accueil. Nous aurions pu aller dans une mosquée, une synagogue ou encore un cinéma ! Peu importe. Ce qui compte véritablement, c’est le message véhiculé. » Il annonce néanmoins que dans une commune aux 141 communautés telle que Saint-Gilles et qui regorge d’exilés, il serait impossible de ne pas agir. «Aujourd’hui, nous organisons tout en dehors des édifices religieux mais nous y reviendrons. Le bourgmestre et le curé sont prévenus. Et lorsque nous viendrons occuper la place et l’église, nous ne serons plus cent mais quinze ou vingt mille. », prévient-il.

Hier, en fin d’après-midi, aucun local n’avait encore été mis à  la disposition des sans-papiers à  Saint-Gilles. Une conférence de presse sera organisée lundi matin à  10 heures sur le parvis par l’UDEP pour faire le point concernant la suite des opérations. Le collectif d’Abdel Bouchoukh poursuivra également son action, en parallèle.
En attendant, la désinformation sur les événements a débuté. Ainsi, le quotidien Métro du 7 avril titre « L’Eglise s’inquiète des occupations, surtout pour des raisons d’hygiène ». La surenchère aux infos destinées à  troubler le débat de fond est en cours, pressions gouvernementales renforcées par pressions ecclésiastiques obligent…

Informations utiles :

• Proposition de loi de l’UDEP : http://udep.blogspirit.com/archive/2006/04/06/la-proposition-de-loi-udep-ou-le-«-cas-par-cas-».html
• Conférence de presse pour l’occupation de l’église du parvis de Saint-Gilles lundi à  10 heures sur le parvis.
• Collectif National des Sans-Papiers et Algériens en grève de la faim: Rue Paul Dejaer, 11A, 1060 Bruxelles.

(les photos: sophie messina)

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(Sur le parvis, les sans-papiers attendent des nouvelles du doyen de l'église. L'inquiétude et l'éxaspération sont palpables.)

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(Sur les conseils de l'UDEP, les sans-papiers se rendent de l'autre côté de la Porte de Hall où l'arrêté communal n'est plus applicable. Le groupe se disperse et chacun finit par rentrer chez soi)

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(Abdel Bouchoukh, porte-parole du Collectif National des sans-papiers remet en cause les méthodes de l'UDEP, trop à  la botte du gouvernement selon lui.)

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(Une vingtaine d'Algériens se sont rassemblés au numéro 11A de la Rue Paul Dejaer. Ils entament une grève de la faim symbolique.)

Mise au point concernant

Mise au point concernant l’occupation de l’église de Saint-Gilles

Comme je lis dans la presse un certain nombre d’inexactitudes à  propos des évènements qui se sont passés ces derniers jours dans et aux alentours de l’église de Saint-Gilles, il me semble opportun de préciser certains points… tout en ne me faisant guère d’illusion sur des rectifications qui seraient faites.

Mercredi dernier, 5 avril, vers 11 h.30, une bonne centaine de personnes de différentes nationalités se sont installés hier mercredi en fin de matinée dans l'église de Saint-Gilles dans l'intention de l'occuper. Et une petite centaine attendait dehors...

La police était présente lorsque je suis arrivé sur place. Ce n’est pas moi qui l’ai appelée.

Sans rentrer dans les détails des différentes "palabres" qui se sont déroulées ce jour-là  jusque passé 18 h., voici ce que j’ai communiqué à  mes confrères et à  l’équipe pastorale dès le lendemain :

· au milieu de l'après-midi, je leur ai demandé de quitter l'église, parce si j'étais prêt à  rencontrer une délégation pour voir comment nous pouvions nous associer à  leur action, je ne souhaitais pas le faire sous la pression.
· les portes de l'église ont ensuite été fermées, et elles le sont restées jusqu’à  samedi midi, à  l'heure de l'office du milieu du jour.
· j'ai rencontré ensuite, en compagnie de Éric et des trois assistants sociaux de l’Entraide, une délégation pour écouter leurs revendications et/ou souhaits.
· et leur ai répondu, en substance, que si nous pouvions nous associer à  leur souhait de voir régulariser la situation des "sans-papiers", j'estimais que notre église n'était pas adaptée à  une occupation : partage du lieu de culte entre cinq communautés, chaudière hors d’usage, sanitaires quasi inexistants, travaux de restauration qui commencent le 18 avril, etc…
· mais que j'étais néanmoins disposé à  les soutenir sous diverses formes : démarche pour une rencontre du Ministre-Président (et Bourgmestre empêché de St Gilles), organisation d'une Conférence de Presse à  l'église, etc...
· il fut également question d'un hébergement à  l'Aegidium : mais, outre le fait qu'il n'est pas sûr que le lieu convienne pour l'hébergement d'un grand nombre (et que le Bourgmestre pourrait empêcher en prenant un Arrêté d'inhabitabilité) et encore moins que le Centre de Jour 3° âge soit favorable, il n'est pas sûr que ce lieu leur convienne, étant moins "symbolique" ; quand une délégation s’y est rendue mercredi, l’entrée leur a été interdite par des policiers. Là  encore, je précise qu’il s’agit d’une initiative des forces de l’ordre et pas d’une demande de ma part.
· il fut enfin également question d'une "permanence" de quelques-uns (combien ?) être eux dans le local d'accueil au fond de l'église, mais, là , nous n'étions vraiment sur la même longueur d'ondes quant au « nombre symbolique » de personnes qui devraient / pourraient s’y tenir. Cela reste une idée à  creuser.
Depuis lors, le contact a été maintenu avec des représentants des « sans-papiers » pour envisager ensemble les actions à  entreprendre et pour lesquelles mon / notre concours était sollicité.
La première de ces actions s’est déroulée ce lundi 10 avril au matin : l’organisation d’une Conférence de Presse où la parole a été donnée aux représentants de l’UDEP (Union pour la Défense des Sans-Papiers), du CRER (Coordination pour la Régularisation et contre les Expulsions), et à  des délégations de l’une ou l’autre église occupée, ainsi qu’à  un juriste de la Ligue des Droits de l’Homme. Vous aurez lu les échos de cette action dans la presse. Cette conférence était, à  mon avis, de bonne tenue même si certaines personnes présentes la trouvaient trop « politique ».
Et maintenant ?
Avec les organisations, je poursuis
1. la recherche d’un local adéquat pouvant les accueillir ; la chose semble plus laborieuse qu’espérée dans un premier temps. Et mes appels ne semblent guère entendus.
2. la demande de rencontres de personnes « en vue » pour que cette problématique des « sans-papiers » ne passe pas aux oubliettes : là  encore, beaucoup de mes interlocuteurs semblent « prudentissimes » ; nous nous trouvons clairement dans un sujet sensible qu’à  quelques mois des élections communales on n’ose pas trop aborder.
Par ailleurs, je pense qu’il est utile de préciser que l’action des paroisses de Saint-Gilles en faveur des sans-papiers est loin d’être négligeable : rien que l’an dernier, 57 % des 878 familles aidées par le service social étaient des « sans-papiers » : cela en fait donc quelques centaines. Cette action de notre service social représente une charge financière plus importante que tout le travail pastoral des cinq paroisses et des dix communautés qui les composent. Et dans ces communautés… il y a nombre de « sans-papiers » : brésiliens (à  Jésus Travailleur), latino-américains (Saint-Gilles) et autres personnes présentes dans les communautés « francophones » ou portugaises. Cela devait aussi être dit, non pas pour en tirer une quelconque fierté (nous ne faisons que notre devoir), mais pour battre en brèche l’accusation selon laquelle nous serions indifférents.
Mais, bien sûr, il s’agit ici de rendre « visible » un problème qui est collectif, et dont nous ne pouvons faire fi.
Bien à  vous,

Christian WIJNANTS.