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La montée du Front National à  Mons-La Louvière

La montée du Front National à  Mons-La Louvière

Notre royaume de Belgique, bien que de modeste taille, dispose de deux extrêmes droites. L’une est flamingante et bien organisée, l’autre est francophone et l’est – pour l’instant – beaucoup moins. L’ancrage nationaliste de la seconde consiste généralement en un patriotisme belgicain unitariste. Celui-ci, comme le nationalisme flamand du Vlaams Belang, apparaît clairement comme un accessoire au service des obsessions d’extrême droite de « corps social purifié » et de « retour aux valeurs et normes historiques et culturelles qui ont donné corps à  la civilisation occidentale », c’est-à -dire la négation des principes qui ont guidé et guident les mouvements politiques et sociaux d’émancipation.

Alors qu’en Flandre le VB fédère une mouvance hétérogène qui va des chrétiens intégristes aux néo-nazis, l’extrême droite francophone peine à  y parvenir. Il y a la droite royaliste et belgicaine ( héritière du courant qui des années 30 aux années 50 souhaitait un pouvoir autoritaire autour de Léopold III ), les résidus du CEPIC ( l’aile ultraconservatrice du PSC bruxellois ), les dissidences poujadistes du PRL, les intégristes de « Belgique et chrétienté », les néo-fascistes passés fin des années 70 par le Front de la Jeunesse, les nombreux groupuscules néo-nazis et néo-rexistes, … Des groupes se font, se défont et se tirent mutuellement dans les jambes. Seul le Front National, fondé en 1985 par le Dr Daniel Féret, arrive à  une relative permanence. Le 24 novembre 1991, le premier « Dimanche noir », il recueille 1,1 % des votes valables en Belgique. A la différence de Rex dans les années 30, son ancrage électoral est essentiellement urbain pour ensuite conquérir des régions plus rurales, et il est concentré principalement ( mais pas seulement ) dans deux points du pays : Bruxelles et les zones déshéritées du Hainaut. C’est particulièrement visible lors des élections communales de 1994 : c’est à  Molenbeek avec 16 % et La Louvière avec 14 % qu’il fait ses deux meilleurs scores. Les élections de 1999 et 2000 lui sont beaucoup moins favorables : il subit en Wallonie la concurrence du Front Nouveau de Belgique de Marguerite Bastien et à  Bruxelles celle du Vlaams Blok, qui lui vole le leadership de l’extrême droite. Mais en 2003, il se ressaisit, profitant des retombées des attentats du 11 septembre et de la guerre antiterroriste de l’administration Bush ainsi que de l’effet Le Pen en avril 2002 en France. Avec les régionales de juin 2004, il dépasse le VB dans 6 des 8 cantons bruxellois.

Mais c’est bien le Hainaut qui est plus que jamais la terre promise. Dans le canton de Charleroi, il remporte 17 % des voix. Dans celui de Louvière et celui de Mons 11 %. Cette région est donc particulièrement touchée. Observons cela de plus près. Les cantons du Borinage émettent des scores très élevés : 10,5 % pour Boussu, 11,3 % pour Dour et 11,4 % pour Frameries. Il s’agit d’une région particulièrement frappées par des difficultés socio-économiques. Le taux de chômage y avoisine toujours les 30-35 %. Les récentes politiques d’ « Etat social actif », concept pour le moins ambigu, ont accentué la chasse aux chômeurs. Ceux-ci estiment que s’ils sont victimes de ce genre de pressions, on ne saurait accepter d’être indulgent vis-à -vis des « étrangers », qu’ils ressentent plus que jamais comme des concurrents déloyaux de surcroît car venus d’ailleurs. Ils se sentent lâchés par des partis supposés les défendre. Et le discours moralisateur avec lequel Franck Vandenbroucke et les tenants de l’Etat social actif accompagnent ces politiques de pression ne fait que renforcer leur amertume ( discours qui n’est que la réintroduction d’une distinction que l’on croyait d’un autre âge, l’époque de la bourgeoisie du XIXème siècle, entre le pauvre « méritant » et celui qui vit aux crochets de la société ). Le rôle joué par le PS dans l’affaire du Pacte ne risque pas de contrecarrer ce sentiment et cette tendance, et si les socialistes francophones continuent à  troquer ce qui leur reste d’empathie contre une froide gestion de l’ordre établi …

Mais il est d’autres choses à  relever. Le FN a aussi effectué une importante percée, perceptible dès 2003, dans des villes du Hainaut beaucoup plus aisées. Citons Soignies ( 8,3 % ), Le Roeulx ( 9,5 % ), Seneffe ( 11,5 % ) et Binche ( 12,7 % ). Ce processus est assez proche de celui qu’a connu le Vlaams Blok : démarrer des centres urbains dégradés et des zones urbanisées désolées pour s’étendre dans des territoires plus ruraux et plus privilégiés ; conquérir un électorat socio-psychologiquement fragilisé pour ensuite mordre sur des groupes sociaux plus « chics » et plus embourgeoisés. Sous l’influence des médias, un sentiment d’insécurité, partant des zones dégradées, s’étend de façon totalement irrationnelle sur les quartiers aisés, là  où il n’y a aucune concentration particulière de délits. Il est entretenu par des années de politiques sécuritaires qui stimulent les réflexes conservateurs des classes moyennes et les rendent donc plus réceptives aux thématiques de la droite ultra. Ajoutons aussi les positions ultralibérales de celle-ci : réduction des indemnités de chômage, « américanisation » du marché du travail avec généralisation des petits boulots mal payés, démantèlement à  terme de la sécurité sociale, grignotage des CPAS, … En gros, ce sont les revendications des franges les plus radicales de la classe dirigeante. Tout cela est soigneusement dissimulé devant le chômeur de Frameries, bien sûr. Il est vrai qu’une nouvelle équipe de cadres est en train de prendre peu à  peu les manettes du parti, phénomène qu’on avait aussi connu au Vlaams Blok au début des années 80. Ces cadres ont d’ailleurs souvent été formés dans les écoles du parti d’extrême droite flamand à  Bruxelles, avant de claquer sa porte. Mais non sans avoir repris certaines de ses techniques de propagande, qu’ils commencent à  inoculer au FN.

Sociologiquement, ce qui frappe donc est le caractère hétérogène de l’électorat. Une portion vote par protestation. Il s’agit d’adresser des « bras d’honneur » à  l’establishment politique, particulièrement le PS. Mais une autre portion vote par adhésion consciente à  l’un ou l’autre point des conceptions de la droite ultra. Généralement, ces points concernent l’antipathie à  l’égard des gens d’origine immigrée ou la thématique sécuritaire. Dans le cas des milieux plus aisés, l’ultralibéralisme du FN ne laisse pas indifférent lui non plus. Soulignons aussi que la frontière entre vote protestataire et vote d’adhésion, si elle existe, n’en est pas moins flottante. Quoi qu’il en soit, si des gens adhèrent, ne fut-ce que partiellement, aux conceptions de groupes qui n’ont aucun idéal politique conforme aux principes des mouvements d’émancipation, c’est le symptôme d’un profond mal social. Et ce mal a des noms : inégalités engendrées par le capitalisme, politiques de régression sociale menées par les gouvernements successifs, marginalisation de groupes croissants de la population, abandon par les partis de gauche de leurs objectifs fondamentaux, chasse aux chômeurs, … En Belgique comme dans toute l’Europe, on ne luttera efficacement contre l’extrême droite que par la redéfinition d’un projet social et démocratique.